Rentrée scolaire : le clientélisme s’invite à Courbevoie

À Puteaux, la rentrée scolaire est devenue depuis quelques années l’objet d’un rituel immuable : fin août, la mairie distribue à 4500 élèves de primaire cartables et fournitures scolaires. Christophe Grébert, élu Modem, fustige régulièrement ce qu’il estime être du clientélisme : « La maire de Puteaux fabrique sa future clientèle en distribuant des cadeaux inutiles. » (Le Parisien, 26 août 2016).

Cette initiative de la première édile de Puteaux, Joëlle Ceccaldi-Raynaud (LR), semble avoir fait un émule à Courbevoie. Arash Derambarsh, président du groupe municipal divers-droite, distribuera le 7 septembre 2016 cinq cents cartables (et fournitures scolaires) aux élèves des écoles primaires, aux collégiens et aux lycéens de notre ville.

Cette initiative, présentée comme une action solidaire par l’un de ses partenaires,  n’est en fait qu’une simple opération de communication politique. Arash Derambarsh reconnaît lui-même dans Le Parisien « qu’aucun justificatif de ressources ne sera exigé ». En d’autres termes, viendra qui voudra. Nous sommes donc très loin d’un coup de pouce aux familles courbevoisiennes les plus défavorisées.

L’action sociale ne s’improvise pas et cette dimension semble avoir totalement échappé à l’élu DVD qui a séché les cinq premières réunions de la commission communale des affaires sociales dont il est membre. S’il avait travaillé son sujet, Arash Derambarsh se serait rendu compte que cette action n’est pas cohérente sur le plan social et sociétal :

1. La distribution de cartables une semaine après la rentrée scolaire paraît tardive. Normalement, les parents ont déjà acheté ce matériel. On imagine mal un enfant se rendre à l’école sans cartable. Au mieux, cette distribution profitera à ceux qui ont été contraints de conserver un cartable usagé faute de moyens. Au pire, on retrouvera ces objets sur Le bon coin, comme c’est devenu la norme à Puteaux ;
2. Proposer un cartable identique pour des élèves du primaire au lycée est une aberration. Il n’y a rien de commun entre un garçon de huit ans et une adolescente de seize ans ;
3. La ville de Courbevoie comprend environ 15000 élèves scolarisés au primaire, au collège et au lycée. Distribuer 500 cartables équivaut donc à toucher 3,33% de cette population. Or, notre commune compte environ 9% de personnes victimes de la pauvreté. Sachant par ailleurs que la distribution se fera sans conditions de ressources et de résidence, le public cible ne sera pas forcément le premier bénéficiaire de l’opération ;
4. La dignité des personnes dans le besoin voudrait que l’on passe par des structures existantes (associations, CCAS…) habituées à gérer ces situations complexes, où la nécessité le dispute à la honte de demander de l’aide et au risque de stigmatisation. À Puteaux, tous les élèves – riches ou pauvres – peuvent potentiellement avoir le même cartable. À Courbevoie, ceux qui auront bénéficié de cette opération médiatisée seront désignés comme potentiellement pauvres…
5. Outre les cartables, des fournitures scolaires (stylos, crayons, gommes, compas…) seront également proposées. Il est à noter que l’UFC-Que Choisir a récemment alerté les familles sur la présence de produits dangereux dans les fournitures scolaires. Nous ne savons pas si les fournitures distribuées le 7 septembre sont concernées par cette mise en garde ;
6. La mairie de Courbevoie n’a pas été prévenue de cette initiative qui risque de créer un attroupement de dizaines de personnes place de Saverne et ainsi poser des problèmes de sécurité.

Au final, singer les pratiques contestables de la ville de Puteaux ne peut que nuire à l’image de la politique locale. Être élu, ce n’est pas la course perpétuelle à la communication. Mais savoir s’effacer au profit d’une action caritative n’est pas à la portée de tout le monde.